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24 juillet 2016 7 24 /07 /juillet /2016 06:36

© ICC-CPI La Cour pénale internationale nourrissait l’espoir d’un monde meilleur en mettant fin à l’impunité des criminels de masse. Elle fut créée par un traité signé à Rome en 1998, entre la fin de la guerre froide et les attentats du 11-Septembre, dans le sillage du tribunal de Nuremberg, chargé de juger les chefs nazis après la Seconde Guerre mondiale, et sur les fondations des tribunaux ad hoc pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda établis par les Nations unies dans les années 1990. Mais à ce jour, seuls 123 Etats adhèrent à ce traité, créant, de facto, une justice à deux vitesses. A ces limites légales se sont ajoutés des choix judiciaires frileux, guidés par des enjeux diplomatiques qui ont obscurci ses ambitions globales. Les auteurs de génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre devaient craindre cette épée de Damoclès, mais seule une poignée de suspects est tombée dans les filets de la Cour. Un jeu d’équilibriste entre justice et politique, dans lequel ses acteurs n’ont pas, ou peut-être pas encore, su s’imposer. LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE, UN JOKER DIPLOMATIQUE Le nouveau siège de la Cour pénale internationale à La Haye. © Schmidt Hammer Lassen Architects C’est « L’interprète », du réalisateur américain Sydney Pollack, qui consacre le mieux la puissance supposée de la Cour pénale internationale. Le film met en scène un dictateur entravé par le glaive de la justice internationale. Mais la fiction dépasse largement la réalité d’une Cour condamnée de facto à exercer une justice à deux vitesses. Sa puissance ne s’exerce à ce jour qu’à l’encontre des ressortissants d’Etats qui ont ratifié son traité ou de ceux qui commettent des crimes sur le territoire de ces derniers. A moins que le Conseil de sécurité des Nations unies ne décide de la saisir. Même si trois des cinq membres permanents du Conseil ne reconnaissent pas la Cour, ils se sont tournés vers elle en 2005 pour les crimes du Darfour, puis six ans plus tard pour ceux commis pendant la révolution libyenne. Il fallait alors susciter des défections au sein du régime et préparer les opinions publiques à l’intervention militaire de l’Otan. Mais à la chute de Mouammar Kadhafi, la Cour s’est retirée, sur la pointe des pieds. Les puissances alliées ne souhaitaient plus que les deux suspects du procureur, l’ancien chef des renseignements, Abdallah al-Senoussi, et le fils du Guide libyen, Saïf al-Islam Kadhafi, comparaissent un jour à La Haye. Le président du Kenya, Uhuru Kenyatta, accueilli par ses partisans à sa sortie d'une audience à la CPI le 8 octobre 2014. © Stéphanie Maupas Les Américains s’opposent à la Cour, pour les mêmes raisons que Russes et Chinois : ne pas perdre un iota de souveraineté. Mais Washington y fait néanmoins ses emplettes, coopérant lorsqu’elle cible des leaders ne figurant pas dans ses favoris, comme le président kényan Uhuru Kenyatta, et la menaçant, lorsque ses choix desservent, dit-elle, ses intérêts nationaux. Il en est de même pour la Palestine, depuis le 1er avril 2015, la Palestine est accueillie à la Cour en tant qu’Etat et espère qu’elle pèsera dans ses négociations avec Israël. Mais beaucoup doutent déjà de sa pérennité si elle devait demain ouvrir des enquêtes sur les crimes commis de part et d'autre dans les territoires occupés. Les « Etats parties » à la Cour Les Etats parties de la Cour pénale internationale sont les Etats ayant signé et ratifié le Statut de Rome Les Etats parties à la Cour (124 au 21 juin 2016) sont chargés, au cours d’assemblées annuelles, de voter le budget, d’élire juges et procureurs et d’amender le code de procédure. Au sein de ce mini parlement, dont les membres disposent d’un vote de poids égal, les Etats débattent de toutes les questions clés : coopération, protection des témoins, réparation pour les victimes, détention, etc. La menace de la CPI est un Joker brandi ici ou là, au gré des intérêts des Etats. Membre ou non de la Cour, aucun ne s’oppose, sur le principe, à la poursuite des criminels de guerre. Mais tous restent jaloux de leur souveraineté. Ceux qui ont adhéré à la Cour ont amendé leurs codes pénaux pour s’assurer qu’aucun de leur ressortissant n’atterrisse dans le box des accusés de la Cour de La Haye, car la Cour n’intervient qu’en dernier recours, si un Etat refuse de juger ceux qu’elle a ciblés. Ceux qui l’ont saisie, comme la République démocratique du Congo, l’Ouganda, la Centrafrique et la Côte d’Ivoire attendent qu’elle « élimine » leurs opposants, tout en engrangeant quelques gages de respectabilité, même si le jeu est risqué et l’effet boomerang jamais très loin. Depuis l’inculpation du président soudanais, puis celle du président kényan, l’Union africaine s’oppose frontalement à la Cour, lui reprochant d’être l’instrument d’un « néocolonialisme » judiciaire. En treize ans, à ce jour [11/02/2016, ndlr], une seule enquête a été ouverte hors du continent africain, même si le procureur a d’autres cibles dans son viseur comme l’Ukraine, la Colombie, la Palestine et même l’Afghanistan. Et alors que le Moyen-Orient s’enflamme, la Cour reste face à ses impuissances. Elle peine à s’engager dans le mortifère face-à-face sunno-chiite, ou à se pencher sur le jihadisme islamique qui s’étend en Afrique. Et son maigre bilan ne suscite guère les soutiens. Elle n'a bouclé que quatre procès contre des Congolais. Liste des Etats sur lesquels la Cour enquête Date : 21/01/2016 - Source : S. Maupas République démocratique du Congo Enquête ouverte le 23 juin 2004, à la demande du gouvernement congolais. Six personnes poursuivies : 2 condamnées, 1 acquittée, 1 non-lieu, 1 en fuite, 1 en procès. Ouganda Enquête ouverte le 29 juillet 2004, à la demande du gouvernement ougandais. Cinq personnes poursuivies : 3 en fuite, 1 en attente de procès, 1 décédée. Darfour, Soudan Enquête ouverte le 6 juin 2005, suite à une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies demandant à la Cour d’enquêter sur les crimes commis au Darfour. Sept personnes poursuivies : 5 en fuite, 1 non-lieu, 1 décédée. République centrafricaine Enquête ouverte le 22 mai 2007, à la demande du gouvernement centrafricain. Une personne accusée, en attente de jugement. Kenya Enquête ouverte le 31 mars 2010, à la demande du procureur de la Cour. Six personnes poursuivies : 4 non-lieux, 2 en procès. Libye Enquête ouverte en mars 2011, suite à une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies demandant à la Cour d’enquêter sur les crimes commis dans le pays depuis février 2011. Trois personnes poursuivies : 1 décédée, 1 renvoyée à la justice libyenne, 1 détenue en Libye. Côte d’Ivoire Le 3 octobre 2011, les juges autorisent le procureur à ouvrir une enquête pour les crimes commis depuis septembre 2002. L’enquête fait suite aux demandes du gouvernement ivoirien. Trois personnes publiquement poursuivies : 2 en attente de procès, 1 incarcérée en Côte d’Ivoire. Mali Le 16 janvier 2013, le procureur a ouvert une enquête sur les crimes commis au Mali depuis janvier 2012, à la demande du gouvernement malien. 1 personne en attente de procès Géorgie Le 27 janvier 2016, les juges ont autorisé le procureur a ouvrir une enquête sur le conflit Géorgie‐Russie de 2008, estimant qu'il existe des raisons suffisantes de croire que des crimes ont été commis entre le 1er juillet et le 10 octobre 2008. Combien ça coûte ? Le budget est adopté chaque année par l’Assemblée des Etats parties. Entre 2002 et 2015, la Cour a coûté plus de 1,13 milliard d’euros. Tous les Etats doivent régler leur quote-part, mais les principaux contributeurs sont le Japon, l’Allemagne, le Royaume-Uni et la France. LES CIBLES DU PROCUREUR Le banc des procureurs au procès de Jean-Pierre Bemba à la Haye, le 22 novembre 2010. © Reuters/Michael Kooren Le tableau de chasse du procureur compte plusieurs chefs d’Etat, quelques ministres et une flopée de miliciens. Si ces choix ressemblent parfois à une véritable loterie, tirer le ticket perdant n’est pas vraiment un hasard. Ceux qui sont ciblés par la Cour ont laissé derrière eux les traces de leurs crimes, devenues les pièces à conviction sans lesquelles aucun procureur ne pourrait conduire leur procès. A celles-ci s’ajoutent leur opposition à la paix, telle qu’espérée ou conclue par les vainqueurs. Jusqu’ici, le procureur a ciblé en priorité des opposants locaux et des protagonistes gênants sur l’échiquier mondial. Dans des conflits où les morts et les rescapés s’alignent par milliers voire millions, les tueurs sont légion. Si le procureur de la CPI tente de poursuivre les plus hauts responsables qui ont planifié et ordonné les crimes, il doit parfois se rabattre sur les seconds couteaux, d’autant que sans force de police, la Cour dépend de la coopération des Etats pour enquêter et arrêter les suspects. Depuis sa création en 2002, la Cour a ouvert des enquêtes dans neuf pays dont huit en Afrique. En République démocratique du Congo (RDC), malgré dix années d’investigation, seuls des chefs de milice ont été poursuivis. Et la Cour a cantonné les conflits de l’Est congolais à leur seule dimension ethnique, épargnant de facto les puissances régionales impliquées, le Rwanda, l’Ouganda et la RDC. Parmi les plus hauts responsables congolais, seul Jean-Pierre Bemba a été poursuivi. De fait, la Cour a placé hors-jeu le principal opposant au président Joseph Kabila, mais sans toutefois l’inquiéter, car le procès Bemba ne révèlera rien des implications régionales : il ne traite pas du Congo, mais de la Centrafrique. En 2002 et 2003, Jean-Pierre Bemba avait envoyé ses miliciens soutenir le régime vacillant du président centrafricain Ange-Felix Patassé. Le leader congolais reste néanmoins le seul protagoniste de ce conflit aux acteurs multiples à répondre de ces crimes devant la Cour. Et ceux qui ont échappé à son couperet se sont de nouveau illustrés lors de la guerre de 2013. Manifestants anti-Gbagbo à Abobo le 8 mars 2011. © Reuters/Luc Gnago En Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo a tiré le ticket perdant au terme d’une élection contestée, soldée dans la violence. Le chef d’Etat ivoirien s’opposait à la sortie de crise décidée par la communauté internationale, dont au premier chef, la France. Si l’accusation assure enquêter sur les crimes commis par les troupes de son rival et successeur, Alassane Ouattara, la justice de La Haye a encore, quatre ans après le début des enquêtes, tous les attributs d’une justice de vainqueurs. Au Kenya, ce sont les vainqueurs de la dernière présidentielle, Uhuru Kenyatta et William Ruto, qui ont été ciblés par la Cour alors que débutait leur campagne électorale. Le troisième candidat, Raila Odinga, sur lequel misaient les diplomaties occidentales pour prendre la tête du pays, n’a en revanche jamais été inquiété. Enfin, c’est le Conseil de sécurité des Nations unies qui a saisi la Cour sur les crimes commis au Darfour et en Libye. Mais le Soudanais Omar el-Béchir n’a jamais été arrêté, alors que deux mandats d’arrêt ont été émis contre lui. Et si en Libye, les cinq grands espéraient susciter des redditions au sein du régime libyen, à la chute de Kadhafi, la Cour devenait inutile, voire gênante. Et pas un seul Libyen n’a comparu devant ses juges. SANS PIÈCES À CONVICTION, PAS DE PROCÈS L’acquittement de l'ancien milicien congolais Mathieu Ngudjolo vient d'être prononcé à la CPI le 18 décembre 2012. ©ICC-CPI C’était le 18 décembre 2012. Solennel, le juge français Bruno Cotte délivrait son verdict contre Mathieu Ngudjolo. Déclarer un accusé non coupable ne veut pas dire que la Chambre déclare son innocence, prévenait-il. Ce jour-là, le milicien congolais était acquitté faute de preuves solides. Ces preuves, le procureur a toutes les peines du monde à les récolter. Et outre cet acquittement, sur les trente-et-un suspects ciblés publiquement par l’accusation depuis 2003, six s’en sont sortis par un non-lieu. C’est dans le nord de l’Ouganda et dans l’est du Congo-Kinshasa que les premières enquêtes de la Cour ont débuté. Les deux territoires sont alors instables, et le procureur veut limiter les risques encourus par ses enquêteurs et ses témoins. L’essentiel de ses investigations est basé sur les témoignages, par nature fragiles et jugés bien insuffisants par les juges, qui réclament aussi des pièces et des expertises médico-légales. Pour limiter les risques au maximum, le procureur Luis Moreno Ocampo choisit alors d’enquêter par procuration. Au Congo, il s’appuie donc sur un réseau d’intermédiaires, dont certains flairent ici l’occasion d’améliorer rapidement leur ordinaire. L'ancien procureur, Luis Moreno Ocampo, lors d'une conférence de presse à la CPI, à la veille de l'ouverture du procès de Jean-Pierre Bemba, le 26 novembre 2009. © Stéphanie Maupas Au final, les avocats de Thomas Lubanga débusqueront un véritable réseau de faux témoins, sans parvenir toutefois à éviter la condamnation de leur client. En Libye comme au Congo, le procureur a aussi délégué ses investigations et jusqu’à la chute de Kadhafi, aucun enquêteur n’a posé le pied sur le sol libyen. Pour nourrir ses dossiers et délivrer trois mandats d’arrêt, il s’est largement appuyé, sans doute trop, sur les opposants au régime d’alors, le Conseil national de transition. Sans force de police, le procureur doit compter sur la coopération des Etats pour conduire ses enquêtes, mais cette stratégie fragilise considérablement son indépendance. Et cette coopération lui fait parfois cruellement défaut comme au Darfour. Le régime soudanais a claqué la porte aux enquêteurs de la Cour suite à l’inculpation du président Omar el-Béchir et le procureur a dû recueillir ses témoignages auprès de réfugiés et d’organisations internationales. Le 29 septembre 2014, audience de confirmation des charges, dans l'affaire Charles Blé Goudé, portée devant la Chambre préliminaire I de la Cour pénale internationale. © ICC - CPI Pendant près d’un an, la Côte d’Ivoire a coopéré sans faiblir avec la Cour, livrant à La Haye Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé. Mais alors que le procureur souhaite s’attaquer également aux éventuels crimes commis par les partisans de l’actuel président Alassane Ouattara, Abidjan refuse de livrer Simone Gbagbo, arguant que la justice ivoirienne est désormais de nouveau sur pied, et capable de juger l’ex‐première dame. Début février 2016, quelques jours après l’ouverture du procès de Laurent Gabgbo, Alassane Ouattara déclarait qu’il n’enverrait plus d’Ivoiriens à la CPI puisque nous avons désormais la capacité de les juger. Une façon de dire à la Cour que si les partisans du régime étaient un jour ciblés, ils ne seraient pas plus du ressort de La Haye. Au cours des trois premières années de son mandat, la nouvelle procureure, Fatou Bensouda, a tenté de réformer sa stratégie d’enquête. Qui est Fatou Bensouda ? La procureure Fatou Bensouda et son adjoint James Stewart, le 27 mars 2014. © Michael Chael Kooren / Pool/AFP Fatou Bensouda a succédé à l’Argentin Luis Moreno Ocampo en mai 2012. En élisant une magistrate gambienne, certains Etats membres espéraient apaiser le continent africain dont les élites sont engagées dans une âpre bataille contre la Cour. Ancienne ministre de la Justice de Gambie, Fatou Bensouda a fait ses classes dans la justice internationale au Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), basé à Arusha, en Tanzanie, au côté de Stephen Rapp, devenu plus tard ambassadeur américain pour les crimes de guerre. En 2004, elle avait rejoint la Cour pénale internationale pour seconder son premier procureur, Luis Moreno Ocampo. Elu en 2012, son adjoint, le procureur canadien James Stewart, est lui aussi issu de la promotion Arusha. LES AVOCATS DE LA DÉFENSE À LA CPI La Chambre d'appel de la CPI confirme la décision de délivrer un mandat d'arrestation pour Abdallah Banda le 3 mars 2015. ©ICC-CPI Ils portent des robes noires et plaident des causes souvent jugées indéfendables par certains. Les avocats devant la CPI conseillent chefs d’Etat, miliciens et politiciens, poursuivis pour des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre commis à des milliers de kilomètres de leur prison. Tout le talent de ces avocats consiste à traduire légalement le combat politique de leurs clients. Gagner sans rien concéder à leurs adversaires : le procureur, d’abord, mais aussi leurs ennemis d’hier, qui ont glissé dans leur carrière un aller simple pour La Haye. Entourés de juristes et d’enquêteurs, les avocats cuisinent les témoins du procureur lors de contre-interrogatoires minutieux, enquêtent sur les sites de crimes pour débusquer pièces et témoins, sans oublier les victimes de drames qui se chiffrent en milliers, voire en millions, de morts, tout en plaidant l’innocence de leurs clients dans les crimes reprochés. Et plaider n’est pas sans risques : mis en accusation pour avoir corrompu des témoins, des faits pour lesquels il plaide « non coupable », l’avocat de Jean-Pierre Bemba, maître Aimé Kilolo, a passé plusieurs mois en cellule aux côtés de son client. Défendre des hommes accusés des pires crimes exige de passer des heures interminables dans une salle sécurisée, à 6 000 kilomètres de l’endroit où tous ces actes terribles ont été commis, dans un pays froid et humide, plaidait un jour maître Catherine Mabille. Avec Jean-Marie Biju-Duval, un vétéran de la justice internationale, ils ont mis à jour une lucrative entreprise de faux témoins dans l’est du Congo, venus déposer à la demande du procureur, sans pour autant éviter la condamnation de Thomas Lubanga à quatorze ans de prison pour avoir enrôlé des enfants de moins de 15 ans dans sa milice. Les partisans de Laurent Gbagbo manifestent devant les bâtiments de la CPI le 30 octobre 2012. © Stéphanie Maupas Les avocats doivent aussi soutenir des clients enferrés dans cette justice lente, qui use à petit feu tous ses protagonistes. Défendu par l’avocat parisien Emmanuel Altit, l’ex-président ivoirien Laurent Gbagbo est le seul qui parvient encore aujourd’hui, à chaque audience, à rassembler ses partisans sur le parvis de la Cour. La protection des témoins Beaucoup de témoins appelés à la barre bénéficient de mesures de protection. Ils peuvent déposer sous pseudonyme, et être aussi relocalisés dans leur pays ou à l’étranger. Mais ce système de protection n’a pas empêché la corruption et les intimidations de témoins. Plusieurs personnes sont poursuivies qui, selon le procureur, auraient corrompu des témoins censés déposer dans l’affaire visant le vice-président du Kenya, William Ruto. DANS LE HUIS CLOS DES CRIMINELS DE GUERRE Couloir de la prison de Scheveningen. © ICC - CPI Laurent Gbagbo traîne ses sandales dans le couloir sans fenêtre de la prison de la Cour, les bras ballants comme lesté par l’écharpe de laine à son cou. Nous sommes à l’automne 2014. L’ex-président ivoirien « fête » ses trois ans à Scheveningen, cité balnéaire en banlieue de La Haye. A ses côtés, Germain Katanga remonte les manches de son élégant costume noir et saisit un cageot de légumes des mains du cantinier. Pour quelques euros, les prisonniers peuvent améliorer l’ordinaire. Et l’ex-milicien congolais a été élu chef cuisinier par ses pairs avant d’être renvoyé à Kinshasa en décembre 2015 pour finir de purger sa peine. Dans ce lieu unique au monde, témoin d’un huis clos singulier où d’anciens miliciens et un enfant soldat côtoient des chefs d’Etat déchus et des politiciens, les deux hommes ont appris à s’apprécier. En perdant le pouvoir, Laurent Gbagbo est passé du palais présidentiel d’Abidjan aux cellules étroites de Scheveningen. Pour Dominic Ongwen, arrêté dans la brousse centrafricaine, le contraste fut tout aussi manifeste. Commandant dans l’Armée de résistance du Seigneur après avoir été kidnappé par la milice ougandaise à l’âge de 14 ans, Dominic Ongwen pense que c’est un grand hôtel !, raconte-t-on. L’ex-enfant soldat, qui ne parle qu’Acholi, une langue du nord de l’Ouganda, serait ravi de son séjour. Il a de l’eau pour se doucher, une cellule pour lui et un lit ! Et il adore le miel au petit-déjeuner ! Mais cette prison « cinq étoiles » n’a rien du Hilton. Lits et lavabos sont scellés aux murs de cellules de 2 mètres sur 4, et la vue sur les miradors y est gâchée par des barreaux serrés. Néanmoins, ce « cinq étoiles » du monde pénitentiaire a son infirmerie, sa salle de sport, de télévision, sa bibliothèque et propose même des cours d’anglais. Centre de détention de Scheveningen Cellule de la prison de Scheveningen. © ICC - CPI Salle de cours et d'ergothérapie de la prison de Scheveningen. © ICC - CPI Bibliothèque de la prison de Scheveningen. © ICC - CPI Salle de jeu de la prison de Scheveningen. © ICC - CPI Salle de sport de la prison de Scheveningen. © ICC - CPI Espace médical de la prison de Scheveningen. © ICC - CPI Parloir de la prison de Scheveningen. © ICC - CPI Parloir de la prison de Scheveningen. © ICC - CPI 1 2 3 4 5 6 7 Mais c’est le bruit et l’odeur qui font surtout la différence avec les prisons sans étoiles. Dans les établissements classiques, il règne une odeur de tabac, de sueur et d’eau de javel, raconte Mikko Sarvela, le commandant du quartier des Yougoslaves, accolé à celui dédié à la CPI, et les cris sont constants. Rien de tout cela entre ces murs dont personne, selon la légende, n’aurait tenté de s’échapper, même si les renseignements néerlandais se sont un temps inquiétés des velléités supposées de Jean-Pierre Bemba. Laurent Koudou Gbagbo comparait à la CCPI le 5 décembre 2011. ©ICC-CPI/AP Photo/Peter Dejong En débarquant au petit matin du 30 novembre 2011, Laurent Gbagbo a été accueilli par son ennemi d’hier. Jugé par le tribunal pour la Sierra Leone, mais hébergé par la CPI, Charles Taylor l’avait salué d’un welcome ! Par le passé, les deux hommes s’étaient envoyés leurs milices par-delà les frontières. Charles Taylor purge désormais sa peine dans une prison britannique, car une fois tombé le verdict final, les détenus quittent les Pays-Bas pour un autre pays. Taylor savait qu’il finirait en prison. Mais il disait aux autres : J’ai été président, j’ai fait ce que j’avais à faire, confie un gardien. Contrairement au « seigneur » de guerre libérien, le sénateur congolais, Jean-Pierre Bemba, ronge son frein. Un matin de mai 2008, armée d’un mandat d’arrêt de la CPI, la police belge l’a arrêté en banlieue bruxelloise, mettant entre parenthèses ses ambitions présidentielles. Depuis Jean-Pierre Bemba se consacre à ses pinceaux et ses toiles pour passer le temps. Long, lorsque les accusés ne sont pas en procès. Le Congolais aurait aussi prêté son piano électronique à l’ex-président ivoirien. Car Gbagbo, il n’aime pas le sport, se rappelle Floribert Njabu, il passe son temps à lire dans sa chambre ! Le 6 Octobre 2015, Germain Katanga assiste à une audience pour examen de la réduction de sa peine. ©ICC-CPI Témoin dans le procès de Germain Katanga, ce politicien de l’est congolais avait été transféré de la prison de Kinshasa pour déposer à La Haye. Avec deux autres témoins, il avait profité de l’aubaine pour demander, sans succès, l’asile politique aux Pays-Bas. Pendant trois ans, il a multiplié les plaintes, demandant des moyens pour joindre sa famille, ou reprochant qu’il n’y ait qu’un canapé-lit pour les visites conjugales. Pour certains, à des milliers de kilomètres de chez eux, les visites familiales sont rares. Mais la dernière fille de Germain Katanga a néanmoins été conçue en prison. JUGER L’IRRÉPARABLE Le 10 mars 2015, six nouveaux juges de la CPI prêtent serment. Les juges Marc Perrin de Brichambaut (France), Piotr Hofmański (Pologne), Antoine Kesia-Mbe Mindua (RDC), Bertram Schmitt (Allemagne), Péter Kovács (Hongrie) et Chang-ho Chung (Corée du Sud) ont été élus pour un mandat de 9 ans en décembre 2014. ©ICC-CPI Ils sont dix-huit pour juger l’irréparable. Dix-huit juges venus des cinq continents pour poser un sceau sur les traumatismes de la guerre, selon les mots de l’écrivaine Shoshana Felman. Robes noires, soulignées d’une étole bleue, ils siègent dans des salles d’audience sans fenêtres, à des milliers de kilomètres des sites de crimes. Ils sont Britanniques, Japonais, Nigérians, Français, etc... et recensent des heures durant les témoignages bouleversants de victimes, s’emparent de dossiers de centaines de milliers de pages qui comptent souvent autant de morts, se plongent dans les rouages de guerres lointaines, suscitant parfois l’impatience des témoins ou des accusés face à leur ignorance. Un grand nombre de destins dépend de la façon dont nous travaillons, dit la juge bulgare Ekaterina Trendafilova. Le destin de ceux qui sont traduits en justice, les destins des victimes et le destin d’une institution nouvellement créée. Face à eux, dans le box des accusés, s’assoient des chefs d’Etats, d’anciens miliciens, des rebelles ou des ministres, désormais soumis, et pour plusieurs années, à leur discipline. Car ce sont eux qui tranchent les objections des avocats, qui décident ou non de donner la parole aux parties civiles, et doivent évaluer le niveau de sécurité des témoins au cours d’audiences très lentes, parfois « secrètes », simultanément interprétées en français, en anglais, et dans la langue des accusés et des témoins : swahili, acholie, lingala... Pour décrocher un siège de juge, dont les émoluments sont plus qu’alléchants, 15 000 euros par mois, ils doivent faire campagne, convaincre Etats et ONG. Et leur élection donne lieu à bien des tractations diplomatiques entre Etats membres. Avant de rejoindre la Cour, ils n’étaient pas tous des juges professionnels. Certains, juristes chevronnés, achèvent ici une carrière de diplomate ou sont professeurs de droit international. Depuis les débuts de la Cour, ils n’ont rendu que trois jugements définitifs, deux condamnations et un acquittement, mais tranché aussi des centaines de requêtes. Leur arme : un code pénal, négocié par des diplomates, qui recèle quelques chausse-trappes rendant les procédures lentes et complexes. Dans le secret de leurs délibérés, qui se prolongent parfois pendant des mois, se livrent des guerres entre tenants du droit anglosaxon ou du droit romano-germanique, les deux grands systèmes juridiques sur lesquels la Cour est bâtie. Abdallah al-Senoussi sous bonne escorte policière, le 19 septembre 2013 à Tripoli. © REUTERS/Stringer Leurs décisions ne sont pas isolées de la politique. Il leur faut aussi mesurer leur impact sur la paix, et parfois sur la Cour elle-même. A l’été 2014, ils décidaient de renvoyer à la justice libyenne l’affaire Abdullah el-Senoussi, l’ex-chef des renseignements de Kadhafi, estimant que Tripoli pouvait conduire son procès, malgré des procédures bien éloignées d’une justice équitable et malgré, surtout, l’éclatement en cours du pays. A l’heure de leurs verdicts, les audiences sont retransmises sur l’internet, mais leurs jugements de plusieurs centaines de pages sont, pour les néophytes, presque illisibles et leurs décisions sont parfois incomprises, car pour les victimes directes des accusés, les peines infligées sont rarement à la hauteur des crimes subis. A LA BARRE DE LA CPI Un fonctionnaire de l’Unité de la sensibilisation montre des photos des suspects à des chefs locaux (sheikhs et sheikhas) lors d’une rencontre au camp de Bredjing, dans l’est du Tchad en 2010. ©ICC-CPI Témoins de la mort de leurs proches, parfois blessées, battues, violées, réduites à l’esclavage, plusieurs centaines de victimes alimentent les rangs des parties civiles à La Haye. Elles sont identifiées par des ONG locales et internationales dans l’est du Congo, en Centrafrique, en Côte d’Ivoire et partout où le procureur enquête. A la CPI, ces victimes d’atrocités qui défient l’imagination et heurtent profondément la conscience humaine, comme le dit le préambule du Statut de Rome, peuvent obtenir des réparations et faire entendre leur voix. C’est l’une des grandes avancées de la Cour. Mais au cours des procès, les victimes sont néanmoins cachées du public par un pseudonyme et leurs avocats sont leurs porte-parole. Il en est ainsi de Julien Zarambaud. A l’ouverture du procès de Jean-Pierre Bemba en novembre 2010, il interpellait les juges : Combien de gens connaissent les victimes, ces pauvres petites commerçantes, ces pauvres cultivatrices qui sont, dans cette salle, des numéros ? Qui les connaît ? Qui connaît ces pauvres femmes qui ont été violées en présence, parfois, de maris et d’enfants ? Pour cet avocat centrafricain, décédé en 2014, c’est quand justice leur sera rendue que les victimes pourront entamer le processus de reconstruction, autant que faire se peut. Thomas Lubanga condamné par la Cour de justice internationale à 14 ans de prison, le 10 juillet 2012. ©ICC-CPI Mais cette justice suscite encore les déceptions. Les victimes s’opposent souvent à leur allié naturel, le procureur, lui reprochant, comme par exemple dans l’affaire Lubanga, d’avoir circonscrit ses enquêtes au seul crime d’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans, ou de l’avoir réduit à un simple conflit ethnique, épargnant de facto les pouvoirs impliqués. L’un de leurs représentants, Hervé Diakiesé, plaidait ainsi que le conflit en Ituri a été instrumentalisé pour le pillage des ressources de la République démocratique du Congo avec la complicité du Rwanda, de l'Ouganda et de certains acteurs locaux. Depuis, le milicien congolais a été condamné à quatorze ans de prison, mais les victimes attendent encore réparations. Elles seront collectives. La Cour promet de faire fleurir en Ituri quelques écoles, des centres de soin, des projets de formation. Mais le Fonds au profit des victimes, un organisme rattaché à la Cour et chargé d’évaluer le montant de ces réparations, est empêtré depuis des années dans une lourde bureaucratie, demandant toujours et encore du temps avant de rendre ses conclusions. Les crimes de l’Ituri jugés par la Cour remontent à 2002 et, plus de treize ans après, les victimes n’ont pas obtenu réparation. Le rôle des ONG Plusieurs organisations non gouvernementales de défense des droits de l’homme ont commencé à militer pour la création d’une Cour permanente au début des années 1990. En février 1995, vingt-cinq d’entre elles créaient la Coalition des ONG pour la CPI, un lobby qui revendique aujourd’hui 2 500 membres. Plusieurs ONG coopèrent aussi avec l’accusation et les victimes pour le recueil de preuves, notamment la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme, Human Rights Watch, et Women’s Initiatives for Gender Justice. CRÉDITS Auteure Stéphanie Maupas, journaliste, auteure du livre « Le Joker des puissants, le grand roman de la Cour pénale internationale », paru aux éditions Don Quichotte. Coordination éditoriale Véronique Barral Rédaction en chef Darya Kianpour, Kèoprasith Souvannavong - RFI Adjoint à la directrice de RFI, Nouveaux Médias Christophe Champin - RFI Conception, graphisme et développement Studio Graphique - Franc


© ICC-CPI

La Cour pénale internationale nourrissait l’espoir d’un monde meilleur en mettant fin à l’impunité des criminels de masse. Elle fut créée par un traité signé à Rome en 1998, entre la fin de la guerre froide et les attentats du 11-Septembre, dans le sillage du tribunal de Nuremberg, chargé de juger les chefs nazis après la Seconde Guerre mondiale, et sur les fondations des tribunaux ad hoc pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda établis par les Nations unies dans les années 1990.

Mais à ce jour, seuls 123 Etats adhèrent à ce traité, créant, de facto, une justice à deux vitesses. A ces limites légales se sont ajoutés des choix judiciaires frileux, guidés par des enjeux diplomatiques qui ont obscurci ses ambitions globales. Les auteurs de génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre devaient craindre cette épée de Damoclès, mais seule une poignée de suspects est tombée dans les filets de la Cour. Un jeu d’équilibriste entre justice et politique, dans lequel ses acteurs n’ont pas, ou peut-être pas encore, su s’imposer.

LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE, UN JOKER DIPLOMATIQUE

Le nouveau siège de la Cour pénale internationale à La Haye. © Schmidt Hammer Lassen Architects

C’est « L’interprète », du réalisateur américain Sydney Pollack, qui consacre le mieux la puissance supposée de la Cour pénale internationale. Le film met en scène un dictateur entravé par le glaive de la justice internationale. Mais la fiction dépasse largement la réalité d’une Cour condamnée de facto à exercer une justice à deux vitesses. Sa puissance ne s’exerce à ce jour qu’à l’encontre des ressortissants d’Etats qui ont ratifié son traité ou de ceux qui commettent des crimes sur le territoire de ces derniers. A moins que le Conseil de sécurité des Nations unies ne décide de la saisir.

Même si trois des cinq membres permanents du Conseil ne reconnaissent pas la Cour, ils se sont tournés vers elle en 2005 pour les crimes du Darfour, puis six ans plus tard pour ceux commis pendant la révolution libyenne. Il fallait alors susciter des défections au sein du régime et préparer les opinions publiques à l’intervention militaire de l’Otan. Mais à la chute de Mouammar Kadhafi, la Cour s’est retirée, sur la pointe des pieds. Les puissances alliées ne souhaitaient plus que les deux suspects du procureur, l’ancien chef des renseignements, Abdallah al-Senoussi, et le fils du Guide libyen, Saïf al-Islam Kadhafi, comparaissent un jour à La Haye.

Le président du Kenya, Uhuru Kenyatta, accueilli par ses partisans à sa sortie d'une audience à la CPI le 8 octobre 2014. © Stéphanie Maupas

Les Américains s’opposent à la Cour, pour les mêmes raisons que Russes et Chinois : ne pas perdre un iota de souveraineté. Mais Washington y fait néanmoins ses emplettes, coopérant lorsqu’elle cible des leaders ne figurant pas dans ses favoris, comme le président kényan Uhuru Kenyatta, et la menaçant, lorsque ses choix desservent, dit-elle, ses intérêts nationaux. Il en est de même pour la Palestine, depuis le 1er avril 2015, la Palestine est accueillie à la Cour en tant qu’Etat et espère qu’elle pèsera dans ses négociations avec Israël. Mais beaucoup doutent déjà de sa pérennité si elle devait demain ouvrir des enquêtes sur les crimes commis de part et d'autre dans les territoires occupés.

Les Etats parties de la Cour pénale internationale sont les Etats ayant signé et ratifié le Statut de Rome

Les Etats parties à la Cour (124 au 21 juin 2016) sont chargés, au cours d’assemblées annuelles, de voter le budget, d’élire juges et procureurs et d’amender le code de procédure. Au sein de ce mini parlement, dont les membres disposent d’un vote de poids égal, les Etats débattent de toutes les questions clés : coopération, protection des témoins, réparation pour les victimes, détention, etc.

La menace de la CPI est un Joker brandi ici ou là, au gré des intérêts des Etats. Membre ou non de la Cour, aucun ne s’oppose, sur le principe, à la poursuite des criminels de guerre. Mais tous restent jaloux de leur souveraineté. Ceux qui ont adhéré à la Cour ont amendé leurs codes pénaux pour s’assurer qu’aucun de leur ressortissant n’atterrisse dans le box des accusés de la Cour de La Haye, car la Cour n’intervient qu’en dernier recours, si un Etat refuse de juger ceux qu’elle a ciblés. Ceux qui l’ont saisie, comme la République démocratique du Congo, l’Ouganda, la Centrafrique et la Côte d’Ivoire attendent qu’elle « élimine » leurs opposants, tout en engrangeant quelques gages de respectabilité, même si le jeu est risqué et l’effet boomerang jamais très loin.

Depuis l’inculpation du président soudanais, puis celle du président kényan, l’Union africaine s’oppose frontalement à la Cour, lui reprochant d’être l’instrument d’un « néocolonialisme » judiciaire. En treize ans, à ce jour [11/02/2016, ndlr], une seule enquête a été ouverte hors du continent africain, même si le procureur a d’autres cibles dans son viseur comme l’Ukraine, la Colombie, la Palestine et même l’Afghanistan. Et alors que le Moyen-Orient s’enflamme, la Cour reste face à ses impuissances. Elle peine à s’engager dans le mortifère face-à-face sunno-chiite, ou à se pencher sur le jihadisme islamique qui s’étend en Afrique. Et son maigre bilan ne suscite guère les soutiens. Elle n'a bouclé que quatre procès contre des Congolais.

Liste des Etats sur lesquels la Cour enquête
Date : 21/01/2016 - Source : S. Maupas

République démocratique du Congo

Enquête ouverte le 23 juin 2004, à la demande du gouvernement congolais.

Six personnes poursuivies : 2 condamnées, 1 acquittée, 1 non-lieu, 1 en fuite, 1 en procès.

Ouganda

Enquête ouverte le 29 juillet 2004, à la demande du gouvernement ougandais.

Cinq personnes poursuivies : 3 en fuite, 1 en attente de procès, 1 décédée.

Darfour, Soudan

Enquête ouverte le 6 juin 2005, suite à une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies demandant à la Cour d’enquêter sur les crimes commis au Darfour.

Sept personnes poursuivies : 5 en fuite, 1 non-lieu, 1 décédée.

République centrafricaine

Enquête ouverte le 22 mai 2007, à la demande du gouvernement centrafricain.

Une personne accusée, en attente de jugement.

Kenya

Enquête ouverte le 31 mars 2010, à la demande du procureur de la Cour.

Six personnes poursuivies : 4 non-lieux, 2 en procès.

Libye

Enquête ouverte en mars 2011, suite à une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies demandant à la Cour d’enquêter sur les crimes commis dans le pays depuis février 2011.

Trois personnes poursuivies : 1 décédée, 1 renvoyée à la justice libyenne, 1 détenue en Libye.

Côte d’Ivoire

Le 3 octobre 2011, les juges autorisent le procureur à ouvrir une enquête pour les crimes commis depuis septembre 2002. L’enquête fait suite aux demandes du gouvernement ivoirien.

Trois personnes publiquement poursuivies : 2 en attente de procès, 1 incarcérée en Côte d’Ivoire.

Mali

Le 16 janvier 2013, le procureur a ouvert une enquête sur les crimes commis au Mali depuis janvier 2012, à la demande du gouvernement malien.

1 personne en attente de procès

Géorgie

Le 27 janvier 2016, les juges ont autorisé le procureur a ouvrir une enquête sur le conflit Géorgie‐Russie de 2008, estimant qu'il existe des raisons suffisantes de croire que des crimes ont été commis entre le 1er juillet et le 10 octobre 2008.

Combien ça coûte ?
Le budget est adopté chaque année par l’Assemblée des Etats parties. Entre 2002 et 2015, la Cour a coûté plus de 1,13 milliard d’euros. Tous les Etats doivent régler leur quote-part, mais les principaux contributeurs sont le Japon, l’Allemagne, le Royaume-Uni et la France.

LES CIBLES DU PROCUREUR

Le banc des procureurs au procès de Jean-Pierre Bemba à la Haye, le 22 novembre 2010. © Reuters/Michael Kooren

Le tableau de chasse du procureur compte plusieurs chefs d’Etat, quelques ministres et une flopée de miliciens. Si ces choix ressemblent parfois à une véritable loterie, tirer le ticket perdant n’est pas vraiment un hasard. Ceux qui sont ciblés par la Cour ont laissé derrière eux les traces de leurs crimes, devenues les pièces à conviction sans lesquelles aucun procureur ne pourrait conduire leur procès. A celles-ci s’ajoutent leur opposition à la paix, telle qu’espérée ou conclue par les vainqueurs. Jusqu’ici, le procureur a ciblé en priorité des opposants locaux et des protagonistes gênants sur l’échiquier mondial.

Dans des conflits où les morts et les rescapés s’alignent par milliers voire millions, les tueurs sont légion. Si le procureur de la CPI tente de poursuivre les plus hauts responsables qui ont planifié et ordonné les crimes, il doit parfois se rabattre sur les seconds couteaux, d’autant que sans force de police, la Cour dépend de la coopération des Etats pour enquêter et arrêter les suspects.

Depuis sa création en 2002, la Cour a ouvert des enquêtes dans neuf pays dont huit en Afrique. En République démocratique du Congo (RDC), malgré dix années d’investigation, seuls des chefs de milice ont été poursuivis. Et la Cour a cantonné les conflits de l’Est congolais à leur seule dimension ethnique, épargnant de facto les puissances régionales impliquées, le Rwanda, l’Ouganda et la RDC. Parmi les plus hauts responsables congolais, seul Jean-Pierre Bemba a été poursuivi.

De fait, la Cour a placé hors-jeu le principal opposant au président Joseph Kabila, mais sans toutefois l’inquiéter, car le procès Bemba ne révèlera rien des implications régionales : il ne traite pas du Congo, mais de la Centrafrique. En 2002 et 2003, Jean-Pierre Bemba avait envoyé ses miliciens soutenir le régime vacillant du président centrafricain Ange-Felix Patassé. Le leader congolais reste néanmoins le seul protagoniste de ce conflit aux acteurs multiples à répondre de ces crimes devant la Cour. Et ceux qui ont échappé à son couperet se sont de nouveau illustrés lors de la guerre de 2013.

Manifestants anti-Gbagbo à Abobo le 8 mars 2011. © Reuters/Luc Gnago

En Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo a tiré le ticket perdant au terme d’une élection contestée, soldée dans la violence. Le chef d’Etat ivoirien s’opposait à la sortie de crise décidée par la communauté internationale, dont au premier chef, la France. Si l’accusation assure enquêter sur les crimes commis par les troupes de son rival et successeur, Alassane Ouattara, la justice de La Haye a encore, quatre ans après le début des enquêtes, tous les attributs d’une justice de vainqueurs.

Au Kenya, ce sont les vainqueurs de la dernière présidentielle, Uhuru Kenyatta et William Ruto, qui ont été ciblés par la Cour alors que débutait leur campagne électorale. Le troisième candidat, Raila Odinga, sur lequel misaient les diplomaties occidentales pour prendre la tête du pays, n’a en revanche jamais été inquiété. Enfin, c’est le Conseil de sécurité des Nations unies qui a saisi la Cour sur les crimes commis au Darfour et en Libye. Mais le Soudanais Omar el-Béchir n’a jamais été arrêté, alors que deux mandats d’arrêt ont été émis contre lui. Et si en Libye, les cinq grands espéraient susciter des redditions au sein du régime libyen, à la chute de Kadhafi, la Cour devenait inutile, voire gênante. Et pas un seul Libyen n’a comparu devant ses juges.

SANS PIÈCES À CONVICTION, PAS DE PROCÈS

L’acquittement de l'ancien milicien congolais Mathieu Ngudjolo vient d'être prononcé à la CPI le 18 décembre 2012. ©ICC-CPI

C’était le 18 décembre 2012. Solennel, le juge français Bruno Cotte délivrait son verdict contre Mathieu Ngudjolo. Déclarer un accusé non coupable ne veut pas dire que la Chambre déclare son innocence, prévenait-il. Ce jour-là, le milicien congolais était acquitté faute de preuves solides. Ces preuves, le procureur a toutes les peines du monde à les récolter. Et outre cet acquittement, sur les trente-et-un suspects ciblés publiquement par l’accusation depuis 2003, six s’en sont sortis par un non-lieu.

C’est dans le nord de l’Ouganda et dans l’est du Congo-Kinshasa que les premières enquêtes de la Cour ont débuté. Les deux territoires sont alors instables, et le procureur veut limiter les risques encourus par ses enquêteurs et ses témoins. L’essentiel de ses investigations est basé sur les témoignages, par nature fragiles et jugés bien insuffisants par les juges, qui réclament aussi des pièces et des expertises médico-légales. Pour limiter les risques au maximum, le procureur Luis Moreno Ocampo choisit alors d’enquêter par procuration. Au Congo, il s’appuie donc sur un réseau d’intermédiaires, dont certains flairent ici l’occasion d’améliorer rapidement leur ordinaire.

L'ancien procureur, Luis Moreno Ocampo, lors d'une conférence de presse à la CPI, à la veille de l'ouverture du procès de Jean-Pierre Bemba, le 26 novembre 2009. © Stéphanie Maupas

Au final, les avocats de Thomas Lubanga débusqueront un véritable réseau de faux témoins, sans parvenir toutefois à éviter la condamnation de leur client.

En Libye comme au Congo, le procureur a aussi délégué ses investigations et jusqu’à la chute de Kadhafi, aucun enquêteur n’a posé le pied sur le sol libyen. Pour nourrir ses dossiers et délivrer trois mandats d’arrêt, il s’est largement appuyé, sans doute trop, sur les opposants au régime d’alors, le Conseil national de transition. Sans force de police, le procureur doit compter sur la coopération des Etats pour conduire ses enquêtes, mais cette stratégie fragilise considérablement son indépendance. Et cette coopération lui fait parfois cruellement défaut comme au Darfour. Le régime soudanais a claqué la porte aux enquêteurs de la Cour suite à l’inculpation du président Omar el-Béchir et le procureur a dû recueillir ses témoignages auprès de réfugiés et d’organisations internationales.

Le 29 septembre 2014, audience de confirmation des charges, dans l'affaire Charles Blé Goudé, portée devant la Chambre préliminaire I de la Cour pénale internationale. © ICC - CPI

Pendant près d’un an, la Côte d’Ivoire a coopéré sans faiblir avec la Cour, livrant à La Haye Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé. Mais alors que le procureur souhaite s’attaquer également aux éventuels crimes commis par les partisans de l’actuel président Alassane Ouattara, Abidjan refuse de livrer Simone Gbagbo, arguant que la justice ivoirienne est désormais de nouveau sur pied, et capable de juger l’ex‐première dame. Début février 2016, quelques jours après l’ouverture du procès de Laurent Gabgbo, Alassane Ouattara déclarait qu’il n’enverrait plus d’Ivoiriens à la CPI puisque nous avons désormais la capacité de les juger. Une façon de dire à la Cour que si les partisans du régime étaient un jour ciblés, ils ne seraient pas plus du ressort de La Haye. Au cours des trois premières années de son mandat, la nouvelle procureure, Fatou Bensouda, a tenté de réformer sa stratégie d’enquête.

La procureure Fatou Bensouda et son adjoint James Stewart, le 27 mars 2014. © Michael Chael Kooren / Pool/AFP

Fatou Bensouda a succédé à l’Argentin Luis Moreno Ocampo en mai 2012. En élisant une magistrate gambienne, certains Etats membres espéraient apaiser le continent africain dont les élites sont engagées dans une âpre bataille contre la Cour. Ancienne ministre de la Justice de Gambie, Fatou Bensouda a fait ses classes dans la justice internationale au Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), basé à Arusha, en Tanzanie, au côté de Stephen Rapp, devenu plus tard ambassadeur américain pour les crimes de guerre. En 2004, elle avait rejoint la Cour pénale internationale pour seconder son premier procureur, Luis Moreno Ocampo. Elu en 2012, son adjoint, le procureur canadien James Stewart, est lui aussi issu de la promotion Arusha.

LES AVOCATS DE LA DÉFENSE À LA CPI

La Chambre d'appel de la CPI confirme la décision de délivrer un mandat d'arrestation pour Abdallah Banda le 3 mars 2015. ©ICC-CPI

Ils portent des robes noires et plaident des causes souvent jugées indéfendables par certains. Les avocats devant la CPI conseillent chefs d’Etat, miliciens et politiciens, poursuivis pour des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre commis à des milliers de kilomètres de leur prison. Tout le talent de ces avocats consiste à traduire légalement le combat politique de leurs clients. Gagner sans rien concéder à leurs adversaires : le procureur, d’abord, mais aussi leurs ennemis d’hier, qui ont glissé dans leur carrière un aller simple pour La Haye.

Entourés de juristes et d’enquêteurs, les avocats cuisinent les témoins du procureur lors de contre-interrogatoires minutieux, enquêtent sur les sites de crimes pour débusquer pièces et témoins, sans oublier les victimes de drames qui se chiffrent en milliers, voire en millions, de morts, tout en plaidant l’innocence de leurs clients dans les crimes reprochés. Et plaider n’est pas sans risques : mis en accusation pour avoir corrompu des témoins, des faits pour lesquels il plaide « non coupable », l’avocat de Jean-Pierre Bemba, maître Aimé Kilolo, a passé plusieurs mois en cellule aux côtés de son client. Défendre des hommes accusés des pires crimes exige de passer des heures interminables dans une salle sécurisée, à 6 000 kilomètres de l’endroit où tous ces actes terribles ont été commis, dans un pays froid et humide, plaidait un jour maître Catherine Mabille. Avec Jean-Marie Biju-Duval, un vétéran de la justice internationale, ils ont mis à jour une lucrative entreprise de faux témoins dans l’est du Congo, venus déposer à la demande du procureur, sans pour autant éviter la condamnation de Thomas Lubanga à quatorze ans de prison pour avoir enrôlé des enfants de moins de 15 ans dans sa milice.

Les partisans de Laurent Gbagbo manifestent devant les bâtiments de la CPI le 30 octobre 2012. © Stéphanie Maupas

Les avocats doivent aussi soutenir des clients enferrés dans cette justice lente, qui use à petit feu tous ses protagonistes. Défendu par l’avocat parisien Emmanuel Altit, l’ex-président ivoirien Laurent Gbagbo est le seul qui parvient encore aujourd’hui, à chaque audience, à rassembler ses partisans sur le parvis de la Cour.

La protection des témoins
Beaucoup de témoins appelés à la barre bénéficient de mesures de protection. Ils peuvent déposer sous pseudonyme, et être aussi relocalisés dans leur pays ou à l’étranger. Mais ce système de protection n’a pas empêché la corruption et les intimidations de témoins. Plusieurs personnes sont poursuivies qui, selon le procureur, auraient corrompu des témoins censés déposer dans l’affaire visant le vice-président du Kenya, William Ruto.

DANS LE HUIS CLOS DES CRIMINELS DE GUERRE

Couloir de la prison de Scheveningen. © ICC - CPI

Laurent Gbagbo traîne ses sandales dans le couloir sans fenêtre de la prison de la Cour, les bras ballants comme lesté par l’écharpe de laine à son cou. Nous sommes à l’automne 2014. L’ex-président ivoirien « fête » ses trois ans à Scheveningen, cité balnéaire en banlieue de La Haye. A ses côtés, Germain Katanga remonte les manches de son élégant costume noir et saisit un cageot de légumes des mains du cantinier. Pour quelques euros, les prisonniers peuvent améliorer l’ordinaire. Et l’ex-milicien congolais a été élu chef cuisinier par ses pairs avant d’être renvoyé à Kinshasa en décembre 2015 pour finir de purger sa peine.

Dans ce lieu unique au monde, témoin d’un huis clos singulier où d’anciens miliciens et un enfant soldat côtoient des chefs d’Etat déchus et des politiciens, les deux hommes ont appris à s’apprécier. En perdant le pouvoir, Laurent Gbagbo est passé du palais présidentiel d’Abidjan aux cellules étroites de Scheveningen. Pour Dominic Ongwen, arrêté dans la brousse centrafricaine, le contraste fut tout aussi manifeste. Commandant dans l’Armée de résistance du Seigneur après avoir été kidnappé par la milice ougandaise à l’âge de 14 ans, Dominic Ongwenpense que c’est un grand hôtel !, raconte-t-on. L’ex-enfant soldat, qui ne parle qu’Acholi, une langue du nord de l’Ouganda, serait ravi de son séjour. Il a de l’eau pour se doucher, une cellule pour lui et un lit ! Et il adore le miel au petit-déjeuner ! Mais cette prison « cinq étoiles » n’a rien du Hilton. Lits et lavabos sont scellés aux murs de cellules de 2 mètres sur 4, et la vue sur les miradors y est gâchée par des barreaux serrés. Néanmoins, ce « cinq étoiles » du monde pénitentiaire a son infirmerie, sa salle de sport, de télévision, sa bibliothèque et propose même des cours d’anglais.

Parloir de la prison de Scheveningen. © ICC - CPI

Mais c’est le bruit et l’odeur qui font surtout la différence avec les prisons sans étoiles. Dans les établissements classiques, il règne une odeur de tabac, de sueur et d’eau de javel, raconte Mikko Sarvela, le commandant du quartier des Yougoslaves, accolé à celui dédié à la CPI, et les cris sont constants. Rien de tout cela entre ces murs dont personne, selon la légende, n’aurait tenté de s’échapper, même si les renseignements néerlandais se sont un temps inquiétés des velléités supposées de Jean-Pierre Bemba.

Laurent Koudou Gbagbo comparait à la CCPI le 5 décembre 2011. ©ICC-CPI/AP Photo/Peter Dejong

En débarquant au petit matin du 30 novembre 2011, Laurent Gbagbo a été accueilli par son ennemi d’hier. Jugé par le tribunal pour la Sierra Leone, mais hébergé par la CPI, Charles Taylor l’avait salué d’unwelcome ! Par le passé, les deux hommes s’étaient envoyés leurs milices par-delà les frontières. Charles Taylor purge désormais sa peine dans une prison britannique, car une fois tombé le verdict final, les détenus quittent les Pays-Bas pour un autre pays. Taylor savait qu’il finirait en prison. Mais il disait aux autres : J’ai été président, j’ai fait ce que j’avais à faire, confie un gardien.

Contrairement au « seigneur » de guerre libérien, le sénateur congolais, Jean-Pierre Bemba, ronge son frein. Un matin de mai 2008, armée d’un mandat d’arrêt de la CPI, la police belge l’a arrêté en banlieue bruxelloise, mettant entre parenthèses ses ambitions présidentielles. Depuis Jean-Pierre Bemba se consacre à ses pinceaux et ses toiles pour passer le temps. Long, lorsque les accusés ne sont pas en procès. Le Congolais aurait aussi prêté son piano électronique à l’ex-président ivoirien. Car Gbagbo, il n’aime pas le sport, se rappelle Floribert Njabu, il passe son temps à lire dans sa chambre !

Le 6 Octobre 2015, Germain Katanga assiste à une audience pour examen de la réduction de sa peine. ©ICC-CPI

Témoin dans le procès de Germain Katanga, ce politicien de l’est congolais avait été transféré de la prison de Kinshasa pour déposer à La Haye. Avec deux autres témoins, il avait profité de l’aubaine pour demander, sans succès, l’asile politique aux Pays-Bas. Pendant trois ans, il a multiplié les plaintes, demandant des moyens pour joindre sa famille, ou reprochant qu’il n’y ait qu’un canapé-lit pour les visites conjugales. Pour certains, à des milliers de kilomètres de chez eux, les visites familiales sont rares. Mais la dernière fille de Germain Katanga a néanmoins été conçue en prison.

JUGER L’IRRÉPARABLE

Le 10 mars 2015, six nouveaux juges de la CPI prêtent serment. Les juges Marc Perrin de Brichambaut (France), Piotr Hofmański (Pologne), Antoine Kesia-Mbe Mindua (RDC), Bertram Schmitt (Allemagne), Péter Kovács (Hongrie) et Chang-ho Chung (Corée du Sud) ont été élus pour un mandat de 9 ans en décembre 2014. ©ICC-CPI

Ils sont dix-huit pour juger l’irréparable. Dix-huit juges venus des cinq continents pour poser un sceau sur les traumatismes de la guerre, selon les mots de l’écrivaine Shoshana Felman. Robes noires, soulignées d’une étole bleue, ils siègent dans des salles d’audience sans fenêtres, à des milliers de kilomètres des sites de crimes. Ils sont Britanniques, Japonais, Nigérians, Français, etc... et recensent des heures durant les témoignages bouleversants de victimes, s’emparent de dossiers de centaines de milliers de pages qui comptent souvent autant de morts, se plongent dans les rouages de guerres lointaines, suscitant parfois l’impatience des témoins ou des accusés face à leur ignorance. Un grand nombre de destins dépend de la façon dont nous travaillons, dit la juge bulgare Ekaterina Trendafilova. Le destin de ceux qui sont traduits en justice, les destins des victimes et le destin d’une institution nouvellement créée.

Face à eux, dans le box des accusés, s’assoient des chefs d’Etats, d’anciens miliciens, des rebelles ou des ministres, désormais soumis, et pour plusieurs années, à leur discipline. Car ce sont eux qui tranchent les objections des avocats, qui décident ou non de donner la parole aux parties civiles, et doivent évaluer le niveau de sécurité des témoins au cours d’audiences très lentes, parfois « secrètes », simultanément interprétées en français, en anglais, et dans la langue des accusés et des témoins : swahili, acholie, lingala... Pour décrocher un siège de juge, dont les émoluments sont plus qu’alléchants, 15 000 euros par mois, ils doivent faire campagne, convaincre Etats et ONG. Et leur élection donne lieu à bien des tractations diplomatiques entre Etats membres.

Avant de rejoindre la Cour, ils n’étaient pas tous des juges professionnels. Certains, juristes chevronnés, achèvent ici une carrière de diplomate ou sont professeurs de droit international. Depuis les débuts de la Cour, ils n’ont rendu que trois jugements définitifs, deux condamnations et un acquittement, mais tranché aussi des centaines de requêtes. Leur arme : un code pénal, négocié par des diplomates, qui recèle quelques chausse-trappes rendant les procédures lentes et complexes. Dans le secret de leurs délibérés, qui se prolongent parfois pendant des mois, se livrent des guerres entre tenants du droit anglosaxon ou du droit romano-germanique, les deux grands systèmes juridiques sur lesquels la Cour est bâtie.

Abdallah al-Senoussi sous bonne escorte policière, le 19 septembre 2013 à Tripoli. © REUTERS/Stringer

Leurs décisions ne sont pas isolées de la politique. Il leur faut aussi mesurer leur impact sur la paix, et parfois sur la Cour elle-même. A l’été 2014, ils décidaient de renvoyer à la justice libyenne l’affaire Abdullah el-Senoussi, l’ex-chef des renseignements de Kadhafi, estimant que Tripoli pouvait conduire son procès, malgré des procédures bien éloignées d’une justice équitable et malgré, surtout, l’éclatement en cours du pays. A l’heure de leurs verdicts, les audiences sont retransmises sur l’internet, mais leurs jugements de plusieurs centaines de pages sont, pour les néophytes, presque illisibles et leurs décisions sont parfois incomprises, car pour les victimes directes des accusés, les peines infligées sont rarement à la hauteur des crimes subis.

A LA BARRE DE LA CPI

Un fonctionnaire de l’Unité de la sensibilisation montre des photos des suspects à des chefs locaux (sheikhs et sheikhas) lors d’une rencontre au camp de Bredjing, dans l’est du Tchad en 2010. ©ICC-CPI

Témoins de la mort de leurs proches, parfois blessées, battues, violées, réduites à l’esclavage, plusieurs centaines de victimes alimentent les rangs des parties civiles à La Haye. Elles sont identifiées par des ONG locales et internationales dans l’est du Congo, en Centrafrique, en Côte d’Ivoire et partout où le procureur enquête. A la CPI, ces victimesd’atrocités qui défient l’imagination et heurtent profondément la conscience humaine, comme le dit le préambule du Statut de Rome, peuvent obtenir des réparations et faire entendre leur voix. C’est l’une des grandes avancées de la Cour.

Mais au cours des procès, les victimes sont néanmoins cachées du public par un pseudonyme et leurs avocats sont leurs porte-parole. Il en est ainsi de Julien Zarambaud. A l’ouverture du procès de Jean-Pierre Bemba en novembre 2010, il interpellait les juges : Combien de gens connaissent les victimes, ces pauvres petites commerçantes, ces pauvres cultivatrices qui sont, dans cette salle, des numéros ? Qui les connaît ? Qui connaît ces pauvres femmes qui ont été violées en présence, parfois, de maris et d’enfants ? Pour cet avocat centrafricain, décédé en 2014, c’est quand justice leur sera rendue que les victimes pourront entamer le processus de reconstruction, autant que faire se peut.

Thomas Lubanga condamné par la Cour de justice internationale à 14 ans de prison, le 10 juillet 2012. ©ICC-CPI

Mais cette justice suscite encore les déceptions. Les victimes s’opposent souvent à leur allié naturel, le procureur, lui reprochant, comme par exemple dans l’affaire Lubanga, d’avoir circonscrit ses enquêtes au seul crime d’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans, ou de l’avoir réduit à un simple conflit ethnique, épargnant de facto les pouvoirs impliqués. L’un de leurs représentants, Hervé Diakiesé, plaidait ainsi que le conflit en Ituri a été instrumentalisé pour le pillage des ressources de la République démocratique du Congo avec la complicité du Rwanda, de l'Ouganda et de certains acteurs locaux.Depuis, le milicien congolais a été condamné à quatorze ans de prison, mais les victimes attendent encore réparations.

Elles seront collectives. La Cour promet de faire fleurir en Ituri quelques écoles, des centres de soin, des projets de formation. Mais le Fonds au profit des victimes, un organisme rattaché à la Cour et chargé d’évaluer le montant de ces réparations, est empêtré depuis des années dans une lourde bureaucratie, demandant toujours et encore du temps avant de rendre ses conclusions. Les crimes de l’Ituri jugés par la Cour remontent à 2002 et, plus de treize ans après, les victimes n’ont pas obtenu réparation.

Le rôle des ONG
Plusieurs organisations non gouvernementales de défense des droits de l’homme ont commencé à militer pour la création d’une Cour permanente au début des années 1990. En février 1995, vingt-cinq d’entre elles créaient la Coalition des ONG pour la CPI, un lobby qui revendique aujourd’hui 2 500 membres. Plusieurs ONG coopèrent aussi avec l’accusation et les victimes pour le recueil de preuves, notamment la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme, Human Rights Watch, et Women’s Initiatives for Gender Justice.




Auteure Stéphanie Maupas, journaliste, auteure du livre « Le Joker des puissants, le grand roman de la Cour pénale internationale », paru aux éditions Don Quichotte.
Coordination éditoriale Véronique Barral
Rédaction en chef Darya Kianpour, Kèoprasith Souvannavong - RFI
Adjoint à la directrice de RFI, Nouveaux Médias Christophe Champin - RFI
Conception, graphisme et développement Studio Graphique - Franc

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12 décembre 2012 3 12 /12 /décembre /2012 18:25

Politique

La CPI confirme sa compétence pour juger Gbagbo

Publié le mercredi 12 decembre 2012 | AFP



Justice
© AFP par DR
Justice Internationale : Cour Penal Internationale (CPI)
Mardi 30 octobre 2012. Haye. Photo : Emmanuel Altit, principal avocat de la défense de l`ancien président Côte-d`Ivoire, Laurent Gbagbo à la Cour pénale internationale



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Transferement de Simone Gbagbo à la Haye: Le ministre Gnenema à reçu une délégation de la CPI
RTI - 6/12/2012

 


Dans le dossier


LA HAYE - Les juges de la Cour pénale internationale (CPI) ont confirmé mercredi que la Cour était compétente pour juger l`ancien président ivoirien Laurent Gbagbo, détenu à La Haye et soupçonné de crimes contre l`humanité.

"L`appel est rejeté", a déclaré la juge Anita Usacka, au cours d`une audience à La Haye, où siège la CPI, confirmant ainsi la compétence de la Cour pour juger Laurent Gbagbo, qui la contestait pour la deuxième fois.

Mais si ce jugement met un point final à la question de la compétence de la Cour, il reste néanmoins théoriquement possible pour M. Gbagbo de soulever une exception d`irrecevabilité, sur laquelle les juges devront statuer. Sa défense n`a cependant jamais annoncé qu`elle envisageait cette option.

Premier ex-chef dÉtat remis à la CPI, Laurent Gbagbo, écroué à La Haye depuis plus d`un an, est soupçonné par la CPI d`être "co-auteur indirect" de crimes contre l`humanité commis pendant les violences postélectorales de 2010-2011.

La CPI s`était déjà déclarée compétente en août, en se fondant sur une déclaration signée par la Côte d`Ivoire le 18 avril 2003 et dans laquelle le pays reconnaissait la compétence de la CPI.

Mais la défense de M. Gbagbo estime que cette déclaration n`est pas valable pour la période pendant laquelle se sont déroulés les faits pour lesquels Laurent Gbagbo est poursuivi devant la CPI.

Elle estime que cette déclaration se réfère uniquement aux événements entre le coup dÉtat de septembre 2002, quand une rébellion armée avait tenté de renverser le régime de Laurent Gbagbo avant de s`emparer de la moitié nord du pays et les accords de Marcoussis de janvier 2003.

Les principaux partis et les mouvements rebelles avaient signé à Marcoussis (région parisienne) des accords prévoyant le maintien de Laurent Gbagbo et un gouvernement ouvert à toutes les parties, y compris les rebelles. Selon la défense, les auteurs de la déclaration d`avril 2003 n`avaient pas pour intention de reconnaître la compétence de la CPI pour d`autres périodes que celle allant du 19 septembre 2002 à la signature des accords.

Mais les juges ont considéré pour la deuxième fois que la déclaration ivoirienne, signée par Bamba Mamadou, alors ministre des Affaires étrangères de Laurent Gbagbo, reconnaissait la compétence de la CPI "pour une période indéterminée".

"Le dernier paragraphe de la déclaration de 2003 suggère que la Côte d`Ivoire accepte explicitement la compétence de la Cour en ce qui concerne les crimes qui auraient été commis après la déclaration", a souligné la juge Usacka.

La Côte d`Ivoire, qui n`est pas État partie au Statut de Rome, le traité fondateur de la CPI, avait annoncé en septembre 2012 son intention de réviser sa constitution afin de pouvoir le ratifier.

Le refus de Laurent Gbagbo de céder le pouvoir à son rival élu, l`actuel président Alassane Ouattara, avait plongé le pays dans une crise qui a fait 3.000 morts.

La prochaine étape dans les procédures à l`encontre de M. Gbagbo devrait être une audience de confirmation des charges, qui doit permettre aux juges de déterminer si les éléments de preuve rassemblés par l`accusation sont assez solides pour la tenue d`un procès.

Mardi, la juge Silvia Fernandez de Gurmendi avait assuré qu`une telle audience devait être tenue "le plus vite possible" et proposé février 2013.

La date devrait être fixée prochainement en concertation avec le bureau du procureur et l`équipe de défense de M. Gbagbo, qui avait assuré avoir besoin de plus de temps pour se préparer.

La défense de M. Gbagbo avait demandé en vain à plusieurs reprises la mise en liberté provisoire de celui-ci, arguant notamment que "cela lui permettrait de "récupérer physiquement et moralement".

Arrêté le 11 avril à Abidjan, Laurent Gbagbo était détenu à Korhogo, dans le nord de la Côte d`Ivoire, jusqu`à son transfèrement à La Haye, le 30 novembre 2011. La défense a affirmé à plusieurs reprises que M. Gbagbo a été "torturé" pendant da détention en Côte d`Ivoire.

 

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8 juillet 2012 7 08 /07 /juillet /2012 21:25
Détention de Laurent Gbagbo à La Haye

 

Tazéré Célestine (député d’Issia) : “Gbagbo était le chef d’orchestre d’une politique d’horreur et de terreur”

 

La décision prise par la direction du Rassemblement des Républicains (RDR) d’organiser des meetings éclatés à travers tout le pays est très bien perçue par le département d’Issia qui a déjà entamé la mobilisation. Hier jeudi, l’honorable Tazéré Olibé Célestine, député de ce département et vice-présidente de l’Assemblée nationale, a reçu à sa résidence, à la Riviera Palmeraie, les associations féminines de la cité du Rocher. Au nombre de ces structures, le RFR, les Amazones, et la vaque 5 millions de femmes engagées pour ADO. Il s’est agi pour la parlementaire d’Issia de mettre en mission ces associations sur le terrain afin de remobiliser la base. « Notre parti est le plus martyrisé de Côte d’Ivoire. En 17 ans de lutte politique, nos militants ont été traqués. Dans nos rangs, il y a eu de nombreux morts, de nombreux enlèvements et séquestrations. Aujourd’hui, le FPI qui est responsable pour beaucoup de nos malheurs, de nos infortunes, de nos larmes, se positionne en victime. Tout en se dédouanant d’être le bourreau qu’il fut hier à coup de mensonges, d’intoxication et de manipulation des masses sur fond de politique machiavélique », a dénoncé l’honorable Tazéré Olibé.
Selon elle, au moment où les Ivoiriens attendent du FPI un acte de contrition dans le contexte de réconciliation nationale que prône le président Ouattara : «ce parti se moque de nos traumatismes, de nos douleurs et de nos souffrances». Face donc à ce qu’elle qualifie de «thématique du mensonge et d’instrumentalisation de l’opinion », l’honorable Tazéré convient pleinement avec la direction du RDR qu’il est temps de donner de la voix. « Il faut que l’opinion sache que Gbagbo n’est pas à La Haye, parce que la communauté internationale a une aversion pour lui. Il y est, parce qu’il est responsable direct de crimes planifiés dont nos militants ont été majoritairement victimes. Il était le chef d’orchestre d’une politique de l’horreur et de la terreur », a-t-elle accusé. Avant de mettre en mission ses « soldats ». « Notre élection au poste de député en décembre 2011 témoigne de la montée en puissance et de la vitalité du RDR à Issia. Il faut maintenir le cap pour de nouveaux lauriers », a-t-elle recommandé.
ALI

 

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8 juillet 2012 7 08 /07 /juillet /2012 20:32

International

Editorial du Président de la Cour pénale internationale, Juge Sang-Hyun Song : la Cour pénale internationale a 10 ans

Publié le dimanche 8 juillet 2012 | CPI





Cour
© Autre presse
Cour pénale internationale (CPI) a la Haye au Pays-Bas
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VIDEO EXCLUSIVE/Crise ivoirienne: Blé Goudé se dit prêt à aller devant la CPI
- AFPTV - 27/6/2012

 

Le 1er juillet 2002, les trois premiers membres du personnel de la Cour pénale internationale sont entrés dans les locaux de la Cour à La Haye aux Pays Bas. Ce jour là entrait en vigueur le traité fondateur de la CPI, le Statut de Rome.

Dix ans après ce modeste départ, la CPI est devenue une institution internationale de premier plan, qui apporte la justice aux victimes lorsque celle ci ne peut être rendue au niveau national. Le Statut de Rome a été ratifié par 121 États et signé par 32 autres, qui ont ainsi indiqué leur intention d’y accéder.

La CPI est actuellement saisie de la situation dans sept pays et suit les développements survenant dans sept autres pays sur plusieurs continents : elle traduit dans les faits les principes consacrés par le Statut de Rome. En mars dernier, la Cour a rendu son premier jugement dans une affaire portant sur l’utilisation d’enfants soldats en République démocratique du Congo. Six procès sont en cours et neuf affaires sont en phase préliminaire. Ces procédures attestent que la communauté internationale ne tolère plus l’impunité des auteurs de génocide, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.

Les victimes occupent une place prépondérante dans le travail de la Cour. Des milliers d’entre elles peuvent désormais faire entendre leur voix devant la justice internationale, qui reconnaît leurs droits et leurs souffrances. Les procédures menées devant la CPI montrent bien, à l’échelle mondiale, que les enfants ne sauraient être utilisés comme soldats pendant les conflits, que l’utilisation des violences sexuelles comme arme de guerre est un crime international inacceptable, et que les tenants du pouvoir doivent protéger les droits humains fondamentaux des personnes prises dans un conflit.

Le soutien dont jouit la justice internationale à travers le monde croît d’année en année. Partout s’exprime la soif de paix, de justice, de primauté du droit et de respect de la dignité humaine. La CPI représente une communauté de nations partageant des valeurs et des objectifs tendant à assurer aux enfants, aux femmes et aux hommes du monde entier un avenir plus serein.

Mais pour nous rapprocher de nos objectifs suprêmes, il nous faut, plutôt que de nous réjouir de nos succès, identifier les aspects à améliorer et les obstacles encore à franchir, et redoubler d’efforts pour renforcer le système instauré par le Statut de Rome. En faisant preuve de sagesse et en unissant nos efforts, nous pouvons empêcher de terribles souffrances.

La CPI est la pièce maîtresse du système émergent de justice pénale internationale, mais les batailles les plus importantes de lalutte contre l’impunité sont livrées dans chaque pays, chaque société, chaque communauté, partout dans le monde. Les systèmes judiciaires nationaux doivent être suffisamment forts pour constituer le principal élément de dissuasion dans tous les pays, tandis que la CPI, « juridiction de dernier ressort », doit rester un filet de sécurité et ne traduire les criminels en justice que lorsque, pour une raison ou pour une autre, les juridictions nationales sont incapables d’agir. Dans un esprit de solidarité, les États parties au Statut de Rome ont exprimé leur détermination à unir leurs efforts pour veiller à ce que ce principe de complémentarité produise concrètement ses effets.

Pour la CPI, il est également essentiel d’obtenir la coopération des États et l’exécution de ses ordonnances. La Cour ne dispose pas d’une force de police. Elle dépend totalement des États pour l’exécution de ses mandats d’arrêt, la production des preuves et la comparution des témoins, entre autres aspects. Malheureusement, nombre de suspects visés depuis plusieurs années par des mandats d’arrêt de la Cour n’ont toujours pas été arrêtés. La volonté politique et la coopération internationale sont essentielles pour que ces personnes soient traduites en justice.

Dans notre lutte commune contre l’impunité et pour l’imputabilité, nous devons nous souvenir que la justice pénale internationale n’est qu’une des composantes d’un dispositif plus large de protection des droits de l’homme, d’atténuation des conflits et d’édification de la paix et de la stabilité. Il est vital de livrer là où il le faut d’autres efforts essentiels de prévention des conflits et de relèvement après les conflits, en conjonction avec les efforts des mécanismes judiciaires internationaux. La justice ne peut véritablement aider à prévenir la commission de crimes dans le futur que si elle est accompagnée par l’éducation, la démocratie et le développement.

Laissons nous guider par cet esprit de solidarité, au seuil de la deuxième décennie de la CPI, à l’heure où nous célébrons nos réalisations et exprimons notre conscience des défis qui restent à relever. Nous devons être unis dans notre détermination à mettre fin à l’impunité, ainsi qu’à l’anarchie, à la brutalité et au mépris pour la dignité humaine que cette impunité implique. À ce moment crucial, nous devons poursuivre cette lutte contre l’impunité avec une détermination renouvelée et une vigueur accrue. Nous ne saurions nous accorder de répit tant que chaque victime n’aura pas obtenu justice.

En ce 10e anniversaire de la Cour pénale internationale, j’appelle les États, les organisations et les peuples à se joindre à cette mission d’humanité.

 



 

 

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3 juin 2012 7 03 /06 /juin /2012 22:05
     

Politique

Crise ivoirienne: les pires crimes ont été commis par le camp Gbagbo (procureur CPI)

Publié le samedi 2 juin 2012 | AFP





Audiences
© Présidence par Aristide
Audiences du chef de l`Etat: le Président Alassane Ouattara a reçu Luis Moreno Ocampo, le Procureur de la Cour pénale internationale
Vendredi 31 mai 2012. Abidjan. Palais présidentiel du Plateau. Le Président Alassane Ouattara a reçu Luis Moreno Ocampo, le Procureur de la Cour pénale internationale
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Les membres de la délégation d'enquête de la Cour Pénal International ont eu une séance de travail avec les autorités Judiciaire Ivoirienne
- TCI - 30/6/2011

 

ABIDJAN - Le procureur de la Cour pénale internationale
(CPI) Luis Moreno-Ocampo a estimé samedi à Abidjan que les crimes les plus
graves commis durant la crise post-électorale ivoirienne de 2010-2011 avaient
été perpétrés par "les forces" de l`ex-président Laurent Gbagbo.
"Les crimes les plus graves commis après l`élection (de novembre 2010,
ndlr) ont été commis, selon le procureur, par les forces de M. Gbagbo", a
déclaré M. Ocampo lors d`une conférence de presse.
Selon les conclusions de son enquête, "M. Gbagbo a organisé des attaques
contre des civils afin de se maintenir au pouvoir", a-t-il affirmé.
L`ex-président ivoirien est toutefois toujours considéré comme "innocent"
jusqu`à son éventuel procès et lors de la prochaine audience il sera assisté
de ses avocats et aura "le droit de présenter ses propres arguments", a
souligné le procureur.
"D`autres allégations contre les forces qui combattaient M. Gbagbo" seront
également examinées, a-t-il par ailleurs indiqué.
"Je pense qu`il est très important que les gens suivent les discussions à
la Cour" afin qu`ils "comprennent en détail ce qui s`est passé en Côte
d`Ivoire", a-t-il ajouté.
Arrivé vendredi à Abidjan, Luis Moreno-Ocampo, à qui succèdera
prochainement à la tête de la CPI son adjointe Fatou Bensouda, s`était
entretenu le jour même avec l`actuel chef de l`Etat Alassane Ouattara, avant
de rencontrer samedi des représentants du parti de Laurent Gbagbo, le Front
populaire ivoirien (FPI).
L`ex-président Gbagbo est détenu depuis le 30 novembre 2011 à La Haye par
la CPI, qui le poursuit comme "coauteur indirect" de crimes contre l`humanité
et crimes de guerre commis par ses forces durant la crise.
Née du refus de M. Gbagbo de reconnaître sa défaite à la présidentielle de
novembre 2010, la crise s`est achevée le 11 avril 2011 après deux semaines de
guerre et a fait quelque 3.000 morts.
L`audience de confirmation des charges, qui doit permettre aux juges de
déterminer si les preuves rassemblées par l`accusation contre l`ancien
président ivoirien sont suffisamment solides pour la tenue d`un procès, doit
débuter le 18 juin.
La défense de Laurent Gbagbo conteste la compétence de la CPI pour le
juger. Son avocat français, Emmanuel Altit, estime notamment que l`ancien chef
de l`Etat a subi une violation de ses droits et des "tortures et autres
traitements inhumains et dégradants" lors de ses huit mois de détention dans
le nord de la Côte d`Ivoire avant son transfèrement à La Haye.
La CPI a dit à plusieurs reprises enquêter aussi sur des crimes qui
pourraient avoir été commis par l`ex-rébellion pro-Ouattara, victorieuse de la
guerre grâce à l`appui militaire décisif de l`Opération des Nations unies en
Côte d`Ivoire (Onuci) et de la force française Licorne.
Selon des ONG internationales, les ex-rebelles pro-Ouattara sont fortement
impliqués notamment dans des tueries qui ont fait des centaines de morts dans
l`Ouest ivoirien fin mars 2011, au début de leur offensive sur Abidjan.

 

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30 mai 2012 3 30 /05 /mai /2012 15:52

 

 

Monde

Charles Taylor condamné à 50 ans de prison
30 mai 2012 à 11:52 (Mis à jour: 16:08)
Charles Taylor à l'ouverture de l'audience lors de laquelle sa condamnation à 50 ans de prison à été annoncée, le 30 mai 2012.
Charles Taylor à l'ouverture de l'audience lors de laquelle sa condamnation à 50 ans de prison à été annoncée, le 30 mai 2012. (Photo United Photos. Reuters)

L’ancien président du Liberia Charles Taylor a été condamné mercredi par la justice internationale à 50 ans de prison après avoir été reconnu coupable d’avoir appuyé des rebelles en échange de diamants lors de la guerre en Sierra Leone.

«L’accusé est responsable d’avoir aidé et encouragé, ainsi que d’avoir planifié, certains des crimes les plus haineux de l’histoire de l’humanité», a déclaré le juge samoan Richard Lussick lors d’une audience publique devant le Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL), à Leidschendam, dans la banlieue de La Haye.

Les traits tirés et la tête souvent penchée vers l’avant, Charles Taylor, vêtu d’un costume sombre, d’une chemise blanche et d’une cravate jaune, a régulièrement fermé les yeux pendant que le juge Lussick lisait la décision. Il fera appel, a déclaré sa défense.

Charles Taylor, 64 ans, est le premier ex-chef d’Etat condamné par la justice internationale depuis le tribunal militaire de Nuremberg qui jugea les dignitaires nazis, parmi lesquels Karl Dönitz, bref successeur d'Adolf Hitler à la tête du IIIe Reich.

L’accusation avait recommandé le 3 mai une peine de 80 ans de prison, que la défense a estimée «disproportionnée et excessive».

Les victimes rassemblées dans une salle du TSSL à Freetown, la capitale de la Sierra Leone, pour regarder le jugement retransmis en direct ont immédiatement salué la condamnation, accueillie dans le silence.

«J’espère qu’il sera hanté par ses actes pendant qu’il croupira en prison», a déclaré les larmes aux yeux Alhadji Jusu Jarka, ancien président de l’association des amputés, qui avait eu les deux bras mutilés par les rebelles du Front révolutionnaire uni (RUF) appuyés par Charles Taylor, qui purgera sa peine en Grande-Bretagne.

Les juges ont estimé qu’une peine de 80 ans de prison était «excessive», rappelant que Charles Taylor avait été reconnu coupable le 26 avril d’avoir eu un rôle crucial dans l’exécution des crimes sans pour autant avoir eu le contrôle «effectif» des rebelles sierra-léonais qui les ont directement commis.

Ils ont toutefois retenu comme circonstances aggravantes le fait que Charles Taylor avait «trahi», selon eux, la position de «confiance publique» dans laquelle il se trouvait en tant que président du Liberia.

«L’opinion de la cour selon laquelle la position de Taylor en tant que chef d’Etat est une circonstance aggravante dans sa culpabilité envoie un signal fort à d’autres leaders au plus haut niveau», a souligné Annie Gell, de l’ONG Human Rights Watch, dans un courriel à l’AFP.

L’avocat de Charles Taylor, Courtenay Griffiths, a pour sa part estimé lors d’une conférence de presse à l’issue de l’audience que «dans les faits, Charles Taylor mourra en prison, c’est de facto une peine de prison à vie».

Mutilations et cannibalisme

«La peine infligée aujourd’hui ne remplacera pas les membres amputés, ne ramènera pas ceux qui ont été tués», a pour sa part déclaré la procureur Brenda Hollis lors d’une conférence de presse à l’issue de l’audience : «mais elle apporte une forme de justice».

Brenda Hollis a indiqué que l’accusation «examinerait soigneusement» la décision avant de déterminer si elle interjettera appel.

Le TSSL ne prononce pas de peine de prison à vie ou de condamnation à mort mais fixe un certain nombre d’années de prison.

Président du Liberia de 1997 à 2003, Charles Taylor avait été reconnu coupable le 26 avril des onze chefs d’accusation de crimes contre l’humanité et crimes de guerre dont il devait répondre, viol, meurtre et pillage notamment, commis entre 1996 et 2002 en Sierra Leone. Il plaidait non coupable.

Si elles souhaitent interjeter appel du jugement et/ou de la peine infligée, la défense et l’accusation peuvent le faire au plus tard 14 jours après avoir reçu le texte complet de la décision sur la peine. Ce processus pourrait prendre plusieurs semaines, selon un porte-parole du TSSL.

Charles Taylor a, selon les juges, «aidé et encouragé» une campagne de terreur visant à obtenir le contrôle de la Sierra Leone, dans le but d’exploiter ses diamants, pendant une guerre civile marquée par des nombreux actes de cannibalisme et mutilations et ayant fait 120.000 morts entre 1991 et 2001.

En échange de diamants, l’ancien président a fourni armes et munitions aux rebelles sierra-léonais du RUF, jouant donc un rôle «crucial» dans les crimes commis par ces derniers, selon les juges.

Délocalisé de Freetown à La Haye en 2006 pour des raisons de sécurité, le procès de Charles Taylor, interpellé au Nigeria en 2006, s'était ouvert le 4 juin 2007 et achevé le 11 mars 2011.

Les Pays-Bas avaient exigé que l’endroit où l’ancien président purgerait sa peine soit déterminé avant d’accepter qu’il soit jugé à Leidschendam. La Grande-Bretagne avait alors proposé que Charles Taylor soit écroué dans une prison britannique une fois condamné.

(AFP)

À lire aussi

L’ex-président sanguinaire du Liberia a été reconnu coupable de crimes contre l’humanité, hier à La Haye.

L'ancien président du Liberia, accusé de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre, a été déclaré coupable sur tous les chefs d'inculpation au terme d'un procès-fleuve.

 

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26 avril 2012 4 26 /04 /avril /2012 16:44

 

 

ancien président libérien Charles Taylor déclaré coupable de crimes de guerre en Sierra Leone

Publié le jeudi 26 avril 2012   |  Euronews



 

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