Les handicapés démontrent leur talent de créateur

Les handicapés d'une dizaine de pays d'Afrique ont démontré leur talent de créateur lors de la troisième édition du festival culturel international des handicapés, Handifestival, du 28 au 30 mai à Dakar.

Dans son fauteuil roulant, Mamadou Camara manie sa guitare avec dextérité, attirant du coup l'attention du public. La quarantaine, cet handicapé moteur, est le soliste de "Yellitaré Lenol", la troupe musicale des handicapés de Mauritanie.

"Je suis dans la musique depuis 30 ans. Je chante et joue la guitare, le clavier et la percussion", confie Mamadou Camara,

Doté d'un répertoire riche qui s'inspire à la fois du patrimoine culturel mauritanien mais aussi international, la troupe Yellitaré Lenol est aussi bien à l'aise dans l' interprétation des airs du folklore que du reggae ou du rock.

Le ballet de l'association des aveugles du Sénégal n'a pas été en reste au cours du festival. Les danses des handicapés avec ou sans béquilles ont à la fois ému et séduit le public.

Dans le jardin de la Maison de la Culture Douta Seck, des artistes peintre handicapés, invitent, à une meilleure prise en charge des handicapés, à travers leurs tableaux exposés en plein air.

Appuyés sur ses deux béquilles, le Camerounais Naa Aristide qui en est sa première participation à Handifestival, explique l' importance de se retrouver à Dakar.

"On a besoin de telles initiatives qui permettent de montrer de quoi nous sommes capables. Parce qu'on a l'impression que personne handicapée veut dire incapable, mais les expositions et les spectacles prouvent le contraire», souligne-t-il.

Les préoccupations et doléances des handicapés sont exposées non seulement à travers les spectacles et les expositions mais aussi par un de leur porte-parole, le Sénégalais Yatma Fall.

Ce père d'une famille de six enfants, handicapé à la suite d'un accident, relève que "jusque-là, on avait des problèmes pour accéder à l'appareillage, à l'éducation et la formation".

C'est ce qui explique, selon lui, que "Dakar est infesté de mendiants handicapés parce que ces derniers n'ont pas eu de formation, donc pas de qualification. Ces problèmes doivent être corrigés parce que nous représentons seulement 15% de la population sénégalaise"

Yatma Fall prône pour l'éducation et la formation des handicapés et pour que "la société soit accessible à tout point de vue aux personnes handicapées : accessibilité physique mais aussi l'acception même de son handicap".

Le Sénégal compte 27 associations nationales de personnes handicapée qui regroupe l'ensemble des catégories de handicaps : handicapé moteur ou physique, visuel, albinos, sourd- muet, lépreux etc.

Pour Ousmane Thiendela Fall directeur de Handifestival, c'est par l'inclusion qu'on peut réussir à faire l'intégration des personnes handicapées.

"C'est la société à travers ses institutions qui doit prendre en charge dans sa conception les personnes en situation de handicap. C'est-à-dire s'il y a une école dans un village, d' emblée on doit concevoir que c'est une école qui doit recevoir des différences et donc, réfléchir à comment l'adapter à la différence ", indique-t-il

Du Sénégal à la Mauritanie en passant le Mali et le Bénin, les handicapés dénoncent le même problème : le difficile accès aux appareils qui facilitent le déplacement, mais aussi aux emplois.

Au Sénégal qui compte 140.000 handicapés, selon un dernier recensement en 2002, vient d'adopter une loi prévoyant de réserver 15% des emplois aux handicapés.